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Sami Blood ou SAMI, une jeunesse en Laponie

Réalisatrice : Amanda Kernell


Avant de parler du film en lui-même, nous pensons qu’il est nécessaire de faire un rapide point sur le peuple à l’origine de cette œuvre : les Sámis. Répartis au Nord de la Norvège, Suède, Finlande, et dans la péninsule de Kola (Russie), qu’on appellera Sápmi (et non Laponie, venant du finnois Lapp, « porteur de haillons »…). Vivant originellement de l’élevage de rennes, la chasse et de la pêche, ils sont aujourd’hui – comme beaucoup d’autres minorités – en lutte pour préserver leurs culture et terre.


Leur histoire est, disons « classique » : peuple autochtone, colonisation suivie d’assimilation forcée se traduisant par l’interdiction de parler dans leur langue, mesure de leur crânes (ayant inspiré les Nazis), déplacement forcé de population vers le Sud et placement forcé de leurs enfants en internat. Et ceci dans les années 1920. Ce n’est qu’à partir des années 1970 que l’émancipation commence.


C’est donc dans un tel contexte que le film se déroule ; années 1930, Ella-Marja est une jeune Sámi se découvrant un désir de vivre une vie autre que celle qui lui est prédestinée en tant que Sami. Entre ses origines qui ne la quittent pas et le mépris raciste des Suédois, ce n’est pas sans douleur et difficultés qu’elle va réussir à s’en défaire.


Vous l’aurez deviné, ce film tourne autour de la question de l’identité. Outre l’assimilation institutionnelle, il est surtout question de représenter les conséquences de ces procédés sur ces individus. Ella-Marja peut être vue comme un individu représentatif de cette période : subit une assimilation d’abord extérieure (placée dans un internat avec interdiction de parler le Sámi), puis « intérieure » (renie ses origines pour se « couler dans le moule », notamment par un changement de patronyme, pour devenir une « vraie » citoyenne).


On se sent emporté par une suite de torrents émotionnels liés aux diverses épreuves traversées par le personnage. Et, bien qu’elle fasse preuve de force face à l’adversité et qu’elle continue d’avancer malgré la peur, on ressent tout de même une forte sensibilité, que ce soit face au racisme des Suédois, ou à l’incompréhension de sa famille. En clair : elle fait preuve de cette même force de caractère que toutes ces personnes coincées entre deux réalités, se doivent d’avoir pour survivre, mais qui est extrêmement difficile à maintenir (on pense notamment aux Amérindiens « américanisés », aux enfants métisses issus du viol d’une esclave, ou encore aux afro-américains considérés comme noirs pour les blancs, et blancs pour les noirs).


Et c’est cette sensibilité, bien qu’humaine, qui fait sa fragilité : consciente de sa position (du « cul entre deux chaises »), elle se retrouve de nombreuses fois totalement seule et incomprise. Et, ça lui est très pesant ; d’un côté sa famille, qu’elle aime, de l’autre, ce qu’elle souhaite, sans aucun moyen d’allier les deux et sans aucune compréhension de sa position de qui que ce soit. En bref, c’est le choix entre la peste et le choléra : dans les deux cas, elle sera toujours incomplète, jamais tout à fait elle-même.


Cependant, le film étant une fresque sociologique, on peut y voir l’évolution des mentalités et l’émancipation des Sámis (bien qu’elles aient encore du chemin à parcourir…) à sa toute fin. Ella-Marja, devenue grand-mère, revient en Sápmi pour l’enterrement de sa sœur avec son fils et sa petite fille. On constate une volonté de ces derniers à renouer avec leurs racines Sámi, malgré la « honte » encore forte d’Ella-Marja, bien qu’elle finisse tout de même par renouer avec son identité (par un magnifique plan final d’ailleurs).


En conclusion, pour paraphraser le Roi Lion (à chacun ses références) : ne jamais oublier qui on est. Oui le passé est douloureux, mais on peut soit le fuir, soit : tout en apprendre.

> Spécial remerciement aux organisateurs du festival des Rencontres cinématographiques de Salon-de-Provence, sans qui une telle découverte artistique et historique n'aurait pas été possible.

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